mercredi 16 septembre 2009

DEUS LO VOLT

Elle était (elle est ?) belle ma voisine. Imaginez : la trentaine, une jolie fille bien bâtie, mince, cheveux au vent, souvent en jeans, dans sa petite voiture noire. Elle courait, elle courait sous le soleil de plomb. Elle faisait bâtir sa maison en même temps que moi. On est voisins. On se voyait souvent sur le chantier. Elle courait, courait, toujours pressée, emmenant ses enfants à l’école, faisant ses courses, téléphone au cou et surtout menant son chantier de main de fer. Elle n’hésitait pas à élever la voix devant le maçon, ou le plombier ou l’électricien. Elle se faisait respecter et tout ce joli monde l’admirait et la craignait. De mon chantier j’observais le manège et je me disais qu’elle était bien plus efficace que moi pour mener une bâtisse. On se faisait la bise, demandions des nouvelles…etc. Parfois avec son regard malicieux et plein de charme elle m’appelait à haute voix et de chantier à chantier : « Voisin, pourriez vous me prêter deux sacs de ciment car il faut que la chape finisse ce soir. Ou’Allah je vous les rends demain » Comment refuser ?
Mon chantier s’est achevé quelques mois avant le sien. Puis j’ai dû m’absenter quelques années. 5 Ans après lors de mes vacances je l’ai revue. Bises, commentaires d’usage…mais…un malaise : elle portait un foulard. J’ai fait comme si je n’avais rien vu. J’ai demandé des nouvelles de son époux, de ses enfants. Réponse plate. Elle était apparemment gênée. Je n’ai pas insisté.
L’année d’après je la revois devant sa maison. Elle me salue de loin avec la main. Je quitte ma voiture et me dirige pour lui faire la bise. Elle me tend la main.
12 mois passent. Je la revois elle porte une djellaba noire, un voile. On ne voit plus que la moitié de son visage. Poliment je lui tends la main. Elle refuse cette poignée. Elle me demande, à un mètre de distance, comment va ma famille. Puis elle court rentrer chez elle.
Cet été je la vois de mon balcon. J’agite les bras. Son mari la suit. Je sors pour les saluer. Son époux que je voyais pour la première fois en 10 ans me dit : « ma femme a fait un vœu : elle ne doit plus toucher aucun homme elle ne conduit plus la voiture ». Je réponds : « elle a eu un accident ? Une maladie ? » « Non » dit il «c’est comme ça (hakka) ». « Très bien » je dis, « très bien. » Et je retourne chez moi.
Bien entendu je respecte et tolère la manière de vivre de tout le monde. Mais cela ne m’empêche pas de me poser des questions : quel phénomène a pu pousser cette femme de passer, de part sa volonté apparemment, de l’état de femme libre à l’état de femme sous tutelle ? Est-ce la pression sociale ? Sont ce des problèmes personnels ? Je ne peux imaginer que ce soit la religion car rien de ce qu’elle faisait n’était contraire à une vie pieuse et sereine. C’est terrible…car je l’ai eue au téléphone il y a quelques mois : « Dieu le veut » me dit elle. « Deus lo volt » criait Urbain II, pape, à Clermont le 27 novembre 1095. On sait ce qu’ont donné les croisades.
C’est terrible car quoi répondre quand Dieu le veut ? Quoi répondre ?
Vous devez connaître autour de vous des gens qui ont toujours raison. Avant même qu’ils n’aient ouvert la bouche, ils ont raison. Inutile d’écouter leurs questions ou leurs réflexions puisqu’ils ont raison.
Bien sûr Dieu a toujours raison. Mais ceux qui parlent de Lui, ont-ils toujours raison ?
Le poète a toujours raison : la femme est l’avenir de l’homme.
Pauvre Planète.
Vivement l’Aïd
Bien à vous.
MALI

5 commentaires:

  1. « Quel phénomène a pu pousser cette femme de passer, de part sa volonté apparemment, de l’état de femme libre à l’état de femme sous tutelle ? »
    Un cocktail socio-culturel-économique :
    1- Le statut d’une femme divorcée est déplorable surtout si elle est « libre ».
    2- L’ignorance el l’obscurantisme qui ne cessent de gagner du terrain au détriment du savoir et de l’illumination.
    3- Même nos femmes libres et autonomes, pensent ou «les» font penser mille fois avant de se décider pour un divorce les privant de quelques conforts.

    Entre temps, elle peut continuer à s’imaginer non voilée, te faire la bise si ce n’est plus, à avoir un statut social correct et à profiter de « son » fric ; Une petitesse d’esprit qui arrange tout le monde.

    Mais enfin de compte, chacun (homme et femme) se prostitue à sa façon tout en se rachetant une virginité.

    Salut l’ami puceau.

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  2. Salut Zorbi,

    Le pucelage a ceci de positif : Tu ne risque ni MST ni SIDA, ni gamins, ni avortement et surtout ni femme pour te les briser. Hélas le Serpent est passé par là et les Cerbères gardiens de l’Enfer jappent.

    Revenons à nos moutons : D’abord et avant tout je n’ai que des relations de bon voisinage avec ma voisine et son époux. Que je respecte et apprécie. C’est clair. Je ne parle pas de divorce et à ma connaissance ma voisine n’est pas divorcée.

    Dans ce billet je cherche la réponse à la question suivante : Qu’est ce qui fait transformer un être humain de l’état libre à l’état de soumission et de dépendance ? J’ai des bribes de réponse :
    - l’addiction : au tabac, à l’alcool, aux drogues illicites peut vous transformer.
    - Une maladie quelconque peut diminuer votre autonomie et vous rendre dépendant etc.
    Mais ma voisine n’est ni droguée ni malade (à ma connaissance). Elle a toute sa tête puisque cet été elle m’a reproché de ne pas avoir fait badigeonner mon mur, ce qui fait « sale » dans le quartier. J’ai immédiatement fait faire les travaux car je veux être agréable pour mes voisins. Sachant que je suis souvent absent, elle m’a même acheté une poubelle pour que je ne laisse plus mes sacs de plastique sur le trottoir. Elle la range chez elle pendant mes onze mois d’absence par an. Elle est donc toujours alerte et sympa. Mais elle ne me tend plus la main, elle ne conduit plus. Elle prend des taxis. Je lui ai proposé de l’aider pour ses courses au super marché. Elle refuse car dit elle « Allah est avec moi ».
    Son mari est désolé. Il ne le dit pas mais il est désolé. Il vit cela comme une fatalité inéluctable. Il aurait aimé, je pense, que sa femme reprenne l’aspect qu’elle avait il y a dix ans.
    Bref. L’attitude de ma voisine ne semble pas être une exception. C’est ce qui m’inquiète car j’aime bien ma voisine et mon voisin. Ce sont vraiment des gens bien.

    Bien à toi Zorbi et mollo sur les sucreries de l’Aïd, toi qui n’es peut être pas puceau.
    MALI

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  3. Très beau texte pour une très triste chose.

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  4. Comme quoi, ceux et celles qui sont les plus libres dans leurs vies et dans leurs choix, ne sont pas forcément les plus libres dans leurs têtes.. et vice versa..

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  5. Ma chère Mayday,
    On nous dit qu’il faut avoir l’esprit ouvert. Soit. Mais si vous avez l’esprit trop ouvert votre cervelle risque de tomber à vos pieds si vous vous penchez en avant ! Faut donc avoir l’esprit mi ouvert pour pas qu’il tombe. Soit.
    Je l’ai déjà dit : quand une meuf met le voile elle ne met pas les voiles. Zocontraire. Elle se met de fait sous tutelle. Mais être mise sous tutelle peut être agréable : on s’occupe de rien…mais obligée d’ouvrir les cuisses. Ce pute agréable pour certaines. Je n’ai pas de solution autre que la pédagogie. Car une femme moderne peut fermer les cuisses si elle est libre. Peut être que le poète a toujours raison ?
    Bien à vous chère Mayday et bigs bisous.
    MALI

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